Après la journée mémorable d’hier en canoë, il est temps de reprendre les bâtons de marche et d’avancer. Nous ne sommes pas encore à la moitié du chemin, il en reste des kilomètres à parcourir !
Jour 6 : plage et saumon
Nous savons que la journée d’aujourd’hui s’annonce longue (23 km environ), nous partons donc « relativement tôt » (9h45) afin d’étirer un maximum les kilomètres et de multiplier les pauses.
Nous longeons le lac, passons le campement des 3 polonais et débouchons sur un chemin très marécageux puis pierreux. En cause : des coulées de boue qui ont raviné les sols. Dur dur d’avancer ! Surtout qu’il n’y a plus ni chemin ni cairn !
Une fois cette portion passée, la suite est très agréable puisque pour une fois nous traversons une vallée. Aucun relief c’est tout droit ! Les kilomètres défilent beaucoup plus vite ! Nous ne sommes que tous les deux. On profite.
Au bout de la vallée, le chemin débouche sur le lac Kangerluatsiarsuaq.
S’ensuit une bonne montée en plein cagnard. Nos tee shirt sont trempés ! La vue en haut de la colline est magnifique. L’objectif de la mi – journée est en vue : la Plage !
L’eau turquoise et le sable nous éloignent du Groenland, on pourrait tout à fait se trouver dans le sud de la France ! C’est assez bluffant…
La pause de midi au soleil est un pur bonheur (même si les moustiques ne sont jamais bien loin). Lars a pêché un beau saumon dans le lac, il propose de le déguster pour le dîner. Une motivation supplémentaire pour arriver à la hutte ce soir 😊
Le profil de la rando ne laisse aucun doute : cet après midi sera sportif avec de multiples montées au programme. Et ça commence juste après la plage.
En pleine pente nous croisons de nouveau un renne. Celui-ci se montre curieux et s’approche vers nous… un peu trop d’ailleurs. On lui demande poliment de passer son chemin et de se méfier des humains qui ne seront pas tous aussi pacifiques…
Petit à petit nous arrivons sur les hauteurs. Le vent souffle avec force (on vous passe l’épisode de la pause pipi sous les bourrasques de vent sans abri… 😆). Le panorama est superbe de là haut !
Le terrain est essentiellement occupé par des petits lacs. Ça monte et ça descend sans cesse. Les américains nous rattrapent, il faut dire qu’ils galopent ! L’un d’eux a 73 ans, il force notre admiration…
La fin de journée semble être un éternel leitmotiv : les jambes nous lâchent, nous sommes crevés.
Le froid n’est pas pour arranger et Nico commence à sentir des douleurs en bas du dos à cause du portage. Il arrive le premier à la hutte d’Ikkatooq à 19h30. Je le rejoins une dizaine de minutes après. Pas de chance pour nous, comme nous avons tardé il ne reste quasiment plus de saumon et la petite hutte est occupée… Le peu que nous goûtons du poisson réveille nos papilles, il est dé-li-cieux. Un saumon sauvage est inégalable en goût c’est certain !
Nous parvenons à planter la tente en plein vent et nous écroulons de fatigue, finalement la nuit sera très bonne !
Les chiffres de la journée :
23,0 kilomètres
308 mètres de dénivelé négatif
490 mètres de dénivelé positif
9h45 de marche
4 marcheurs croisés
Jour 7 : passage à gué
Le 5ème jour de l’ACT est le plus court en terme de kilomètres. Un petit répit dont on compte profiter !
Nous faisons nos adieux à Lars qui reste une journée de plus ici histoire de pêcher tranquillement. La journée débute directement par une montée bien raide pour atteindre un haut plateau.
Progressivement on distingue la vallée en contrebas, celle que nous allons devoir traverser pour remonter ensuite sur le versant opposé.
Aujourd’hui, je souffre de la hanche droite. Ça grince… Une douleur apparaît, une autre disparaît… Chaque partie du corps y passe. Quelques pruneaux et abricots secs pour reprendre des calories et nous entamons la descente. Nico est en face de moi, je le vois tout à coup stopper net. Il me fait discrètement signe de la main de le rejoindre. Puis je le vois : c’est un renardeau polaire !! Il est trop mignon !
Ce sont des animaux assez craintifs avec une ouïe très fine et il est difficile de les observer. Ce petit à encore sa fourrure d’été, l’hiver sa fourrure s’épaissit et blanchit pour passer inaperçu dans la neige. Le renard polaire peut survivre dans des températures allant jusqu’à – 50 degrés c’est fou !
La vallée que nous voyions d’en haut s’étend à présent devant nous. Arrivés à un panneau indiquant « bridge » nous nous posons des questions sur le chemin à prendre. 2 solutions : soit nous poursuivons dans la vallée marécageuse à gauche (ce qui nous rajoute des kilomètres) pour traverser la rivière sur un pont soit nous continuons tout droit et passons la rivière à gué.
Pendant les préparatifs, nous redoutions un peu les passages de rivières. D’une saison à l’autre, et même d’un jour à l’autre, le niveau d’eau peut vite monter et avec le courant il convient d’être prudent. Il n’a pas plu ces derniers jours, nous décidons donc de tenter la rivière. Nous arrivons à midi sur la rive. Le niveau d’eau ne semble pas très haut, on peut y aller ! Nous changeons de chaussures, retroussons les pantalons, protégeons nos sacs et le matériel sensible. Un bâton dans la main extérieure, on se tient par le bras et entrons dans l’eau en biais par rapport au courant. L’eau est gelée, le courant assez fort mais petit à petit nous avançons et parvenons à atteindre l’autre rive. Ouf ! Finalement c’était plus facile que ce que nous avions imaginé depuis la France !
La récompense du jour est un bon bain dans la rivière. Toilette complète : les bonheurs les plus simples sont souvent les meilleurs… (5 jours sans douche ni lingettes, hum bonjour les odeurs…). Les zones marécageuses qui longent la rivière compliquent comme toujours notre progression. Nos chaussures s’enfoncent et il faut sans cesse prévoir où poser le prochain pas… la moindre touffe d’herbe, le moindre petit caillou constituent un îlot salvateur au milieu de toute cette flotte boueuse…
1,5 km de montée et nous sommes arrivés à l’étape du jour : Eqalugaarniarfik !
Il est 17h10, de quoi profiter tranquillement de la fin de journée ! La vue depuis la tente sur le Fjord est magnifique. Parfois des petits bateaux s’aventurent jusqu’ici, c’est la première fois du trek qu’un lien avec l’extérieur est possible.
Nous ne profitons malheureusement pas beaucoup de l’extérieur, le soleil est vite caché par le relief et les mouches et moustiques ont décidé de ne nous laisser aucun répit ! (la faute aussi à une carcasse d’animal mort non loin du campement que nous ne verrons que plus tard…). Le point d’eau n’est pas tout près, Nico en profite pour rapporter quelques baies, la saison des myrtilles a débuté miam ☺
Les chiffres de la journée :
12,45 kilomètres
406 mètres de dénivelé négatif
217 mètres de dénivelé positif
6h20 de marche
2 marcheurs croisés
Jour 8 : la cabane au bord du lac
Départ 9h07. La grande montée (dont une partie sur une piste créée par des bulldozers ?!!) que nous voyions depuis le campement n’était pas une illusion d’optique : il faut bien la grimper ! Étonnamment ma douleur à la hanche a disparu, je me sens en grande forme ☺ Le temps est couvert, au moins on ne transpire pas ! Sur les hauteurs nous faisons une première pause pour avaler une barre de céréale. Mine de rien les vivres s’amenuisent, chaque nourriture ingérée est un poids en moins dans le sac et ça commence à se faire sentir. Il est plus facile de ré-enfiler les sacs après les pauses.
Nous suivons une crête qui monte et qui descend. Comme toujours le silence est roi. On prend garde à la redescente à ne pas se fouler une cheville, le terrain n’est pas très stable.
En pleine descente nous apercevons 2 des 4 américains assis sur le côté. Nous comprenons que quelque chose cloche quand nous voyons l’un des deux emmitouflé dans son sac de couchage. C’est l’homme de 73 ans qui nous avait tant impressionné par sa rapidité. Il semble avoir fait un malaise cardiaque. Black out total pendant quelques minutes 😕 Son fils vient d’appeler les secours grâce à sa balise GPS. C’est le même type de balise que nous, il est possible d’envoyer un SOS mais pas de communiquer par message. Il faut maintenant attendre… Nous nous sentons un peu inutiles et pouvons simplement lui donner notre eau avant de reprendre notre chemin. Nous préviendrons leurs 2 compagnons de route ce soir.
Un arrêt au lac en bas permet à Nico d’attraper son premier poisson… sans canne à pêche ! ^^
Le contournement du lac est une horreur, le chemin est très étroit et boueux… Second lac, même problème. Le repas du midi se fait avec les filets sur la tête, on a vu plus pratique…
Nico ressent de vives douleurs sur ses lésions du bas du dos. Je rajoute encore une couche de straps.
Pour ne rien arranger les marécages dans les buissons nous font plus que pester. Le contournement par le haut semble finalement aussi compliqué…rrrrhh…
Les eaux calmes du lac reflètent à la perfection les montagnes, un vrai miroir.
Nouvelle douleur au niveau du haut de la cuisse droite, je ne peux plus lever la jambe… super ! On pense qu’il va, peut être, être difficile de boucler l’étape du jour.
Nous arrivons au dernier lac de la journée qu’il nous faut contourner sur toute sa longueur. Une grande plaine à côté d’un lac on sait maintenant ce que ça signifie : des marécages !
Ah on s’enfonce vraiment bien jusqu’à la cheville ! Nico aperçoit une femelle renne. Après le contournement du lac et de la montagne nous apercevons au loin une petite hutte en haut d’une colline (Innajuattup Tesia), l’allemand est sur sa route. Nous visons une deuxième hutte, que l’on sait plus grande et refaite dernièrement. Cette nuit on compte bien dormir au chaud. Nous poursuivons donc encore sur 700 mètres, mais l’allemand y va aussi… Vite ! Nico accélère, l’allemand est sur ses pas, mais il ne le rattrapera jamais 🙂 ! Il y a déjà du monde mais il reste de la place.
Nous sommes au top dans cette petite cabane au bord du lac 🙂 Nous sommes maintenant à 3 jours de marche de Sisimiut, nous sommes partagés entre l’envie de réussir ce challenge et de retrouver du confort et celle de prolonger le plaisir d’être au calme dans ces paysages si reposants…
Les chiffres de la journée :
20,20 kilomètres
259 mètres de dénivelé négatif
434 mètres de dénivelé positif
9h15 de marche
3 marcheurs croisés