C’est en montant dans un bus à Los Antiguos , en Argentine, que l’idée d’un voyage au Groenland a germée. Un vieux baroudeur arborait fièrement sur son sac à dos usé 2 écussons : Antarctique et Groenland. Nous avions alors pour projet de descendre à Ushuaïa pour tenter l’aventure Antarctique mais le Groenland… ? Les icebergs, les Inuits… Ce nom réveilla notre imaginaire et piqua notre curiosité. 2 ans et demi plus tard, nous voici dans le hall de Roissy en attente de notre vol pour le cercle polaire…
Faux départ
Dimanche 5 août 2018, aéroport Roissy Charles de Gaulle, l’excitation monte. Après plusieurs mois de préparation et de dépenses, le jour J est enfin arrivé. Les sacs à dos reprennent du service ! La balance du guichet d’enregistrement affiche 20 kg pour mon sac, 21 kg pour Nico.
Pour se rendre au Groenland 2 possibilités : passer par le Danemark ou par l’Islande. En raison d’une belle promo (traduisez « un cadeau empoisonné ») nous transitons par l’Islande. Le vol pour Reykjavik de 3h passe relativement vite.
En posant le pied sur l’île nous comprenons que la canicule est derrière nous et enfilons la doudoune. L’escale est de courte durée : 1 nuit et une matinée. Le temps d’entre apercevoir la ville et de déguster une bonne soupe servie dans du pain.
Le lendemain au petit matin, Nico tente de faire le check-in pour notre vol du soir à destination de Kangerlussuaq au Groenland. Mais le vol n’apparaît nulle part… On vérifie sur le site du voyagiste (Budget Air pour ne pas les citer), le vol est toujours annoncé OK… bizarre… En consultant le site de l’aéroport on réalise qu’aucun vol ne part de Reykjavik pour Kangerlussuaq ces prochaines semaines. En fait cette liaison semble ne plus exister DU TOUT !!! C’est la douche froide. Tous ces préparatifs pour échouer aux portes de l’avion… 🙁
On se ressaisit, passons des coups de fil sans succès à l’agence, vérifions les vols du jour, une option alternative semble possible ! On décide de se rendre directement à l’aéroport domestique (et non international… !!!) où Air Iceland nous confirme que le vol a été supprimé il y a plusieurs mois ( ??!*#☆ !) et qu’ils ne peuvent rien faire pour nous :-(. Ils nous proposent cependant l’alternative vue le matin avec un vol pour Nuuk la capitale dans 2 heures suivi d’un vol pour Kangerlussuaq juste après qu’il nous faut prendre avec Air Greenland. C’est risqué mais gros coup de bol, il reste des places !
Cette alternative nous coûte les deux bras, tant pis on prend en piochant dans nos réserves et réglerons tout ça au retour.
Premier contact avec la glace
Nuuk la capitale est située sur la côte ouest, au sud du cercle polaire arctique. Pour l’atteindre il faut donc survoler l’intérieur des terres du Groenland constitué de glace : c’est l’Inlandsis, la calotte polaire.
Nous sommes littéralement scotchés au hublot de notre petit coucou à hélices. La côte Est est en vue.
Les icebergs se font de plus en plus gros. On voit des glaciers plonger dans la mer. C’est in-cro-yable.
Bientôt il n’y a plus que du blanc. Partout. L’impression de survoler une planète de glace ou d’être au paradis. Avec la réverbération nos yeux sont éblouis, il est difficile de maintenir le regard même avec les lunettes de soleil !
L’arrivée sur la côte ouest avec ses Fjords est tout aussi impressionnante.
Avec la Polynésie, je pense que c’est le plus beau vol de notre vie.
Kangerlussuaq : il va falloir s’habituer aux noms imprononçables
L’escale de quelques heures à Nuuk va nous permettre de faire nos premiers pas dans la Nature groenlandaise. L’aéroport est minuscule et réduit au strict nécessaire : 2 bureaux d’enregistrement, des toilettes, des sièges, un distributeur de boisson (le coca est à 4 euros !?) et un petit café (fermé). On tourne vite en rond et allons explorer les abords du tarmac. Il fait froid mais avec le soleil ça passe, on s’attendait à pire ! Première surprise à quelques mètres de la piste on trouve… une station de ski avec remontée mécanique ! On remonte la piste et admirons la vue sur la ville.
L’heure de vol jusque Kangerlussuaq, à l’intérieur des terres, est encore une fois magnifique (habituez vous aux superlatifs).
La petite ville de 500 habitants est une ancienne base américaine qui servait de hub aux liaisons entre l’Amérique du nord et l’Europe. On ne risque pas de se perdre, il n’y a qu’une seule route ! L’aéroport est, avec celui de Nuuk, le seul aéroport international de l’île. Toute l’activité de la ville tourne autour de lui. Le secteur bénéficie de nuits claires 300 jours /an, c’est donc un endroit privilégié pour l’observation des aurores boréales (à partir de septembre), sujets d’études des scientifiques du coin, notamment.
Pour la première fois de notre vie, nous posons les pieds au nord du cercle polaire arctique.
Nous logeons à l’auberge de jeunesse (Vandrehjem), dixit « le logement le moins cher du Groenland » (30 €/pers en dortoir). C’est simple mais bien organisé. On s’allonge sur nos lits et prenons le temps de réaliser : nous sommes bel et bien arrivés au Groenland !! Avec 2h de retard sur le planning initial, on s’en sort « bien » !
La visite de la ville le lendemain matin est bien agréable. 4h de décalage horaire, 20° de moins, anglais mêlé de Danois, nouvelle monnaie : il faut prendre ses marques ! Mais on adore ce moment dans le voyage où beaucoup de nos repères se retrouvent tout à coup chamboulés.
Le supermarché vaut à lui tout seul une visite. Remarquez qu’on a vu plus accueillant comme entrée :
1er constat : tout coûte très cher (paye ton Nesquik à 5 euros), le rayon alcool est caché à la vue de tous par un élégant rideau, il y a plus de choix que ce qu’on pensait excepté le rayon fruits et légumes…
On a posé les pieds sur l’Inlandsis
En début d’après midi nous partons en bus avec l’agence Albatros Circle pour un tour vers la calotte polaire, située à seulement 37 km. En bus, c’est une formalité, nous allons apprendre qu’à pied c’est autre chose…
Le choix de Kangerlussuaq comme point de départ de « l’aventure Groenland » n’est pas innocent. Depuis de nombreux mois nous préparons méticuleusement une petite « expédition ». Nous avons en effet pour objectif de réussir l’Arctic Circle Trail (ACT), une randonnée sauvage de 160 km reliant Kangerlussuaq à Sisimiut sur la côte ouest. Histoire de pimenter le tout nous avons décidé de partir non pas du centre de Kangerlussuaq mais de la calotte polaire. Relier la glace à l’océan : tout un symbole !
Une partie de nos affaires est en soute, l’autre est à l’auberge. Nous nous éloignons de la ville et empruntons la vieille piste qui servait de piste d’essai aux véhicules Volkswagen.
Les paysages sont aussi changeants que surprenants !
Premier contact avec la toundra polaire.
Nous faisons un stop près d’une carcasse d’avion et devant des vestiges de chasseurs de la préhistoire (site classé UNESCO). Nous allons revoir ces paysages au ralenti le lendemain (photos dans le prochain article).
La glace. C’est elle que nous venons admirer. Progressivement elle se révèle à nous, au fur et à mesure que les kilomètres défilent.
Un lièvre arctique traverse la route, le bus s’arrête, terminus tout le monde descend ! Certains camperont sur la glace cette nuit avec un guide, d’autres repartiront à Kangerlussuaq et d’autres referont le trajet inverse à pied (nous sommes 4).
Vu du ciel l’inlandsis était déjà impressionnant mais de la terre ferme c’est tout aussi spectaculaire !
L’inlandsis en quelques chiffres :
2400 km de long
1000 km de large
1 726 000 km² de surface
250 000 ans l’âge de la glace la plus ancienne
3 694 mètre le point culminant
Représente 10 % du volume total d’eau douce de la planète
2ème Inlandsis de la planète après l’Antarctique. Les autres ont complètement disparus au cours des dernières glaciations. Sont qualifiés d’Inlandsis (littéralement « glace de l’arrière pays ») tout glacier dont la surface est supérieure à 50 000 km².
Bref il en impose. Nous marchons pendant 1h sur la glace. C’est une première pour moi. Nico a déjà expérimenté la marche sur glacier au Perito Moreno.
La glace à cet endroit n’est pas aussi blanche et bleutée qu’à l’intérieur mais cela reste beau, pur, silencieux…
18h : il est temps maintenant de reprendre les sacs et de déplier les bâtons : le trek commence maintenant. La côte et l’océan sont à 200 km tout droit en face de nous. C’est partiiii !